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Islamistes contre "missionnaires".



Je dois manifestement souffrir d’un masochisme exacerbé pour passer mes journées de retraité à lire, des heures durant toutes les insanités qui dégoulinent des réseaux sociaux. S’il m’arrive de tomber parfois sur des messages intelligents, sensés et généralement bien écrits, malheureusement le plus clair du temp, je reste noyé dans cette fange nauséabonde que dégage l’incohérence des propos du tout venant sur la Toile. A croire que pour exister, il suffirait de balancer, par clavier interposé, des idées approximatives, dans un style approximatif pour enfin ne rien dire ou dire n’importe quoi. J’ai glané au passage cette définition des réseaux sociaux : c’est de la scatologique sans le caca.


Pourquoi donc me suis-je laissé aller à gober de l’imbuvable ? Cette immersion dans l’insoutenable m’a cependant conduit à trouver quelques réponses à mes multiples questions et parfois à faire des « découvertes ». Ceci rend, oh comble de l’ironie, cette immersion plutôt « féconde » !


Dire que le Maroc est aujourd’hui traversé par des courants de pensée antagonistes et irréconciliables relève d’une lapalissade de triste réalité. Cette immersion dans les réseaux me rappelle que je me suis lourdement trompé dans mes précédents écrits où je me réjouissais d’appartenir à un pays à l’identité « complètement aboutie ». Ces écrits ont fait les choux gras de ceux qui chantaient les avantages de l’exception marocaine. J’avais une vision passéiste d’un Maroc qui n’était pas encore en butte aux attaques de forces endogènes et exogènes.


Oui, le Maroc subit des assauts de toutes natures qu’il arrive difficilement à contenir ou qu’il ne sait pas contenir. De tous ces assauts le plus dangereux, mais aussi le plus évident, c’est incontestablement l’islamisme ! Il se nourrit du terreau local rendu d’autant plus fertile avec la destruction de l’école, de la famille et avec la misère endémique qui frappe une majorité de Marocains. Les pouvoirs publics ne sont pas étrangers à l’éclosion et le développement de cette mouvance. Ils se sont lourdement trompés d’ennemis en s’attaquant exclusivement aux forces de gauche, laissant prospérer l’islamisme, pour en faire une sorte d’antidote. On peut décliner de l’attitude des autorités beaucoup de défaillances qui étaient autant d’encouragements à l’expansion de cet obscurantisme. Les élites locales ne sont pas exemptes de tout reproche. Leur silence, interprété par certains comme une franche adhésion, a fait basculer les hésitants et timorés dans l’ombre des religieux.


Telles sont, très sommairement, les forces endogènes qui ont permis à l’islamisme de se positionner à la place qui est la sienne aujourd’hui.


La pression des forces exogènes n’était pas moins forte. La plus redoutable de toutes c’est incontestablement la sournoise pénétration du wahhabisme. Redoutable, car ceux qui ont adhéré à cette secte sont les éléments les plus dangereux et les plus menaçants avec un modus operandi exclusivement fondé sur la violence. D’autres influences extérieures sont venues renforcer en sous-mains l’islamisme. On peut citer le Qatar, la Turquie et certains ajoutent Israël et l’Occident qui ont fait de la fragilisation des sociétés arabo-musulmanes un objectif stratégique.


Parallèlement à l’islamisme et du cortège de malheur qu’il sème autour de lui, le Maroc est entrain de subir une œuvre de démolition toute aussi dangereuse menée par des forces apparemment non encore structurées, et qui visent ni plus ni moins que d’en finir avec l’identité marocaine. On verra plus loin que ces propos ne sont pas exagérés.


J’ai appelé ces forces, les « missionnaires » pour deux raisons. D’abord parce qu’ils se croient investis de la mission de parachever l’œuvre que les colons n’ont pu accomplir, ensuite parce la majorité de ceux et celles qui s’érigent en porte-parole de cette nouvelle croisade, sont généralement issus des missions culturelles étrangères, notamment française.


Attention, il ne me vient pas à l’idée, une fraction de seconde, de jeter l’opprobre sur tous ceux qui ont suivi ces cursus. Je les respecte d’autant plus que mes propres enfants sont le pur produit de l’enseignement français. Car comme eux ils sont nombreux à refuser de s’inscrire dans ce nouveau catéchisme de la « haine de soi » (expression malheureuse que j’emprunte aux sionistes notoires qui l’utilisent pour désigner les Juifs qui ne sont pas des inconditionnels de la politique israélienne).


La colonisation a été d’abord celle des esprits, le moyen le plus sûr pour que la domination perdure. Lors de l’avènement du Protectorat, le Maroc traversait une crise existentielle le rendant vulnérable et perméable au bon comme au mauvais. Le progrès technique était un appât suffisamment fort pour infléchir la vigilance des Marocains. Ils s’étaient jetés sur tout ce qui venait de chez l’occupant même si c’était au prix de graves renoncements à une partie de leur identité. Un processus inexorable s’était alors mis en place pour permettre à la France d’étendre sa domination sur toutes les forces vives du pays.


Cette domination multiforme est devenue intolérable pour l’élite nationaliste qui réclama l’indépendance. Dans la lutte pour l’indépendance les nationalistes avaient tout focalisé sur le pouvoir politique, pensant qu’à partir de là ils pourront ultérieurement affranchir le pays de la domination économique et culturelle.


Gilbert Granval, résident général de la France aurait déclaré : « Qu’importe que cesse l’occupation du Maroc, car aujourd’hui la France occupe de nombreuses têtes de l’élite marocaine » (j’ai mis le conditionnel car je n’arrive plus à retrouver les références de cette déclaration qui m’avait bien marqué). Déclaration prophétique, car aujourd’hui c’est par Marocains interposés que se poursuit la colonisation. Elle est doublement pernicieuse ! D’une part parce ce qu’elle est menée par ces « missionnaires » , eux-mêmes colonisés dans leur tête et qui jouent aux colons, d’autre part s’agissant de nouveaux convertis, ils agissent toujours dans l’excès.


Ce sont ces colons new-look qui investissent les réseaux sociaux pour reproduire ce qui se passe en France. Ils le font d’une manière plus incisive, parfois plus violente pour donner le change à leurs commanditaires. Ils deviennent les auxiliaires serviles de tous ceux qui en Occident rêvent d’éradiquer l’Islam, car ils sont les relais, pour ne pas dire les amplificateurs des procès d’intention visant les Musulmans.


Nos « mercenaires » aux esprits formatés à la française, n’ont aucune connaissance de l’Islam ou de la langue arabe, comme ils ignorent tout de la réalité du pays vu leur origine sociale et leur cursus. Alors, faute d’arguments pour déconstruire le discours islamiste, ils se contentent de reproduire, en les en amplifiant, tous les discours de haine de l’Islam que déversent les médias français.


Sans eux, les médias français seraient inaudibles au Maroc, mais grâce à eux l’impact de ces médias est plus dévastateur, du fait que c’est des Marocains qui véhiculent des idées sombres pour faire douter d’autres Marocains de leur foi, de leur culture, de leur identité. Cette attitude exacerbe tous ceux qui gardent un minimum d’attachement aux valeurs du pays. Il y en a qui finissent par rejoindre les islamistes en réaction à ce déferlement de haine.


L’islamisme est condamné à terme. Il disparaîtra à coup sûr, beaucoup plus tôt que prévu. Mais aujourd’hui, ces « missionnaires » qui sont censées le combattre, n’arrivent en fait qu’à l’entretenir pour qu’il perdure. On est tenté de dire que islamistes et « missionnaires », même combat ! Même ennemi : notre identité !


Le moment est venu pour que la majorité silencieuse qui n’appartient ni à l’un ou l’autre clan, sorte de sa torpeur pour mener avec la dernière énergie un double combat. D’abord contre l’islamisme jusqu’à ce que la religion reste cantonnée, une fois pour toutes, dans la sphère personnelle, intime ! Ensuite contre ce que j’ai appelé « missionnaires » qui, consciemment ou non, mènent un travail de sape en essentialisant tout ce qui est en rapport, de près ou de loin, avec notre foi, notre culture, notre identité.


Abdelahad Idrissi Kaitouni


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