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Quid d’une révolution culturelle?



Un placard posté récemment et préconisant «une révolution culturelle pour reconstruire le Marocain», m’a valu des réaction très contrastées. C’est l’inconvénient du placard, qui, comme le slogan se veut sobre et concis, mais n’est jamais précis. Je vais essayer ici de préciser ma pensée.


Le discours du Trône a recueilli l’assentiment de larges couches de la population, car comme cette population le Roi se plaint de l’Administration et des dysfonctionnements des Institutions. Il a utilisé les mêmes termes que vous et moi pour décrier les tracasseries auxquelles nous faisons face au quotidien. Retrouver nos propres mots dans les propos du Roi est certes réconfortant mais troublant à la fois. Que les propos du citoyen lambda trahissent son impuissance face aux dérives du pouvoir, rien de plus naturel, comment expliquer alors que le Roi, qui est le Pouvoir, utilise les mêmes mots pour … se plaindre ?


On imagine que le Roi a voulu lancer comme Charles De Gaulle naguère un «Je vous ai compris !» Il n’empêche que le trouble né de l’utilisation des mêmes mots pour parler de la crise est en train de céder la place à une forme de désenchantement qu’il s’agit de contenir au plus vite.


En effet, maintenant que l’opprobre a été jeté sur des pans entiers de la société, nombre «d’intellectuels de Facebook» sont montés au créneau pour suggérer des solutions à l’emporte pièces du type «il n’y a qu’à …». Va-t-on se lancer dans une sorte de chasse aux sorcières ?


Il faut raison gardée, car les seuls moyens coercitifs ne conduisent pas aux solutions les plus appropriées. Gardons à l’esprit que la capacité de nuisance de ceux qui sont mis à l’index est très grande. Apparemment la voracité semblait moindre du fait de l’appartenance au système, une manière de ménager quelque peu la vache à lait. Une fois exclus du système ils risqueraient de pratiquer la politique de la terre brûlée avec tout son cortège de dévastation.


Rien ne garantit que leurs remplaçants soient meilleurs. Doute raisonnable puisque ces remplaçants seront issus des mêmes milieux sociaux, baignant dans la même culture. C’est là que l’idée d’une révolution culturelle s’impose. Dessein prioritaire : changer notre culture, changer notre manière de penser, notre manière d’être ! Bref, «reconstruire un Marocain nouveau» pour un Maroc nouveau.


Ce défi pourrait être vite relevé dès lors qu’il sera tiré par une forte volonté politique. Oui, d’autres défis ont été relevés par le passé, et il faut faire confiance à notre intelligence collective, à la perspicacité du Marocain et sa propension à faire un bon usage des réseaux sociaux.


Oui, le recours aux nouvelles technologies peut nous épargner des épisodes excessifs de la révolution culturelle chinoise. On ne placardera pas sur les murs et les arbres des «Dazi Bao» pour dénoncer les traîtres, les corrompus et autres prévaricateurs.


Ils sont des millions de Marocains, prêts avec leur clavier à dénoncer et à mettre au banc de la nation tous ceux qui seraient tentés d’attenter à l’intérêt général. Il y aura sûrement des outrances, des dérapages. Mais quelle est cette révolution qui ne s’est pas nourrie de ses propres enfants ? C’est la transition la moins violente pour asseoir un nouveau type de rapport avec l’intérêt général.


Si l’Internet est un outil utile pour la transition démocratique, il n’est pas suffisant. L’autre outil décisif c’est la Télévision. Avec l’éducation nationale, c’est le plus gigantesque gâchis du pays. Le Makhzen n’a vu dans la TV qu’un outil de propagande et de communications officielles. Il a abandonné, outre le domaine de la création artistique et culturelle, toute vocation d’éducation des nouvelles générations.


Rien d’étonnant que la désaffection à l’égard des chaînes nationales soit totale !


Cette volonté d’abdication de la culture s’est clairement manifestée dans la gouvernance de l’audiovisuel. Imaginez qu’en 40 ans seuls deux responsables se sont succédés à sa tête.


Qu’importe les qualités qu’on pourrait ou ne pas trouver à ces personnes, il n’empêche qu’il y a là une anomalie manifeste : 60% des Marocains n’ont connu que MM. Tricha et Laraïchi. Leur inamovibilité pose des problèmes troublants et nous payons aujourd’hui la facture ce coupable laisser aller.


Les Marocains sont devenus maîtres dans l’art de l’analyse et du diagnostic, mais rares sont ceux qui font des prescriptions, qui proposent des remèdes.


J’ai voulu à mon tour rompre avec ces torrents d’analyses pour focaliser sur un semblant de remède. La solution vaut ce qu’elle vaut. Elle est tout sauf chimérique car elle épouse notre temps en s’appuyant sur les technologies du savoir et de la connaissance, domaines où nous avons le plus perdu. Elle est aussi perfectible grâce à l’apport de chacun.



Abdelahad Idrissi Kaitouni.

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