Tout a été dit sur les événements du Rif. Tout et son contraire !
J’aurai tant voulu ne pas en rajouter à mon tour, mais j’ai été interpelé par une idée qui revenait d’une manière lancinante : la carence pour ne pas dire la démission des partis politiques.
J’adhère totalement à ce constat, mais je ne peux me résoudre à passer mon chemin sans me poser la question pour savoir pourquoi ces partis sont dans un état de léthargie pour les uns, sous perfusion pour certains et dans un coma profond pour les autres.
La santé des partis politiques est un élément non négligeable de la solution de la crise. C’est parce qu’ils ont été affaiblis qu’ils n’arrivent plus à encadrer les masses, laissant ainsi l’espace libre pour les aventuriers de tous bords.
Une solution viable passe nécessairement par la compréhension du pourquoi et du comment de l’affaiblissement du paysage politique marocain.
Dans un post antérieur, j’ai expliqué comment durant quatre décades, l’USFP a pu canaliser le mécontentement populaire malgré des accès de fièvre en 1965, 1981 et 1984. L’USFP a su amortir le choc entre la rue et le Makhzen.
Le même rôle a été joué par le PJD qui avait réussi en 2011 à récupérer le mécontentement de la rue initié par le mouvement du 20 Février. Par cette récupération le PJD a contribué à réduire les risques de débordement.
Il ne faut pas voir dans cette analyse une quelconque proximité avec l’un ou l’autre parti. Concernant le PJD par exemple, c’est un parti que je combats avec la dernière énergie, ne partageant avec lui ni valeurs ni méthodes.
Le minimum de probité intellectuelle commande de souligner le rôle éminemment positif pour le Makhzen de ces partis. Mais alors comment expliquer l’acharnement du Makhzen à laminer ceux qui l’ont servi.
On se rappelle la manière avec laquelle Jettou a été imposé pour ne pas reconduire Yousfi, alors que son parti était arrivé en tête (ce qui n’a pas été sans effet sur le délitement de l’USFP). Plus récemment, un « blocage » artificiel a été créé pour éviter la reconduction de Benkirane, avec pour objectif la déstabilisation du PJD.
Certes le Makhzen a utilisé des procédés plus « soft », pour ne pas arriver à ces holdups sur la volonté populaire. C’est le cas récemment avec la création du PAM. Un parti sans vocation pour gouverner, mais avec un objectif précis : dynamiter les partis et accentuer ainsi l’émiettement du paysage politique marocain.
Ce fut un échec lamentable, car tous les partis ont été réduits à la proportion congrue, sauf le principal visé, le PJD, qui a gagné plus de 20% des sièges.
C’est à croire que le Makhzen est hanté par deux obsessions : la première c’est empêcher l’émergence d’une personnalité politique d’envergure nationale et/ou internationale. Comme la stature d’un Homme d’Etat se forge dans la durée, il faut éviter à tout prix la reconduction de tout politique ayant un minimum de charisme. L’éviction peu élégante de Yousfi puis de Benkirane en dit long sur les pratiques du Makhzen à ce sujet.
Deuxième obsession, éviter par tous les moyens qu’aucun parti n’ait la majorité par les urnes, quitte à falsifier la volonté des électeurs. Feu Basri était orfèvre en la matière. La seule majorité acceptable pour le Makhzen est celle qui résulte de tractations entre partis souvent antinomiques.
Sans leader charismatique et avec des programmes édulcorés dans le cadre d’alliances contre nature, les partis ont été totalement discrédités, et partant, c’est tout le jeu démocratique qui est à tout jamais condamné.
Ces obsessions sont incompréhensibles, car si l’écrasante majorité des Marocains croient dur comme fer à la Monarchie, le Makhzen est le seul qui donne l’impression de ne pas y croire.
Pour échapper aux obsessions, il donne en pâture les partis politiques, accentuant ainsi la désaffection du citoyen à l’égard de la chose publique. Et comme corollaire, le risque d’un affrontement avec la rue !
La dualité Makhzen-Gouvernement est quelque chose de pernicieux. En perdurant dans sa forme actuelle, elle nous entraîne vers des lendemains qui… déchantent !
Certes le Gouvernement peut être révoqué à tout moment. Qu’en est-il du Makhzen ?
Une réforme en profondeur s’impose. Car il est temps que le Makhzen devienne monarchiste. A l’image de tous les Marocains !
Cette réforme doit permettre la restauration du jeu démocratique qui, immanquablement re générera des partis politiques capables de jouer pleinement leur rôle de relais avec le pouvoir et aussi et surtout d’amortisseurs de crises.
Abdelahad Idrissi Kaitouni.
C'est vraiment un article à la hauteur, surtout votre réelle réalité et cette vérité concernant ici ( le PJD ) et le blocage de BENKIRANE.
Merci Monsieur.