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Photo du rédacteurNouveau Don Quichotte

A quand le démantèlement de la FIFA ?




« La FIFA possède une longue tradition de pots-de-vin, de magouilles et de corruption. La FIFA se conduit comme une famille de mafieux. La corruption a été érigée en système et soutenue par l'absence d'investigations et où la plupart des accusés échappe aux enquêtes. Des douzaines de travailleurs immigrés tués dans la construction des stades au Qatar sont ainsi ignorées »

Ce ne sont pas les propos d’un fieffé complotiste, mais le témoignage en 2014, devant la Chambre des Lords à Londres de l'ancien président de la fédération anglaise de football David Triesman. Il conforte les conclusions de nombreux journalistes d’investigation qui avaient enquêté sur les malversations qui ont jalonné l’histoire de la FIFA ces dernières décennies.


Malgré l’opacité du système FIFA, des journalistes comme John Sugden et Alan Tomlinson, dans un premier temps et ultérieurement Andrew Jennings, ont réussi à révéler les sordides opérations auxquelles se livraient des responsables FIFA, et cela se passait souvent au plus haut niveau. Ce fût le cas de Jão Havelange, qui présida aux destinées de cet organisation de 1974 à 1998, et qui s’était fourvoyé dans des malversations avec son gendre, Ricardo Teixeira président de la Fédération de Football du Brésil.


Puis ce fût le tour du Suisse Sepp Blatter (1998-2015) de s’embarquer dans des indélicatesses qui ont conduit à son éviction de la tête de la FIFA, après sa mise en cause par la Justice américaine. Le système Blatter était d’une redoutable efficacité puisqu’il impliquait systématiquement des Chefs d’États.


On l’a vu pendant la campagne pour l’attribution de la Coupe de 2010 où le très respectable et vénérable Mandela se promenait avec des valises pleines de billets pour acheter des votes en faveur de l’Afrique du Sud. Comme quoi le prestige de Mandela ne suffisait pas pour gagner des voix, car le système ne fonctionnait qu’avec du cash.


Le même schéma allait se reproduire pour l’attribution de la Coupe de 2018 à la Russie, et celle de 2022 au Qatar. Mais cette fois-ci, c’est le Président français Sarkozy, aidé en cela par le Président de l’UEFA Platini, qui, pour des raisons encore obscures a forcé la décision en faveur du Qatar. Nous avons vécu ces dernières semaines certaines péripéties qui ne sont pas sans rapport avec ce coup de force. Les sommes folles engagées par cet Émirat liquéfiait toute forme d’éthique en annihilant toute résistance.


La FIFA, tout en brandissant l’étendard du football, le jeu le plus prisé au monde, semble toutefois moins préoccupée par la compétition sportive que par le formidable cash qu’elle génère, et concomitamment par le souci de satisfaire le commanditaire qatari. De là à imaginer que les erreurs d’arbitrage n’étaient que fortuites, très peu spécialistes accepteraient de l’admettre.


La valeureuse équipe du Maroc semble en avoir fait les frais lors de la demi-finale contre la France. Une équipe où opère un des joueurs les plus talentueux, K. Mpapé affilié à son corps défendant au … Qatar. La Coupe a finalement été remportée par l’Argentine menée par un des plus grands joueurs de tous les temps, L. Messi, l’autre image du … Qatar. Pouvait-on imaginer un autre scénario ?


Apparemment non, puisque le Qatar n’a pas dépensé plus de 200 milliards de dollars pour que le résultat final ne soit pas en conformité avec le script qu’il a écrit conjointement avec la FIFA. En définitif, le véritable vainqueur est sans nul doute le Qatar qui a réussi à organiser la meilleure et la plus spectaculaire de toutes les Coupes du monde, et en apothéose, il a fini par aligner en finale les deux joueurs qui lui sont le plus proche.


Les étoiles s’étaient-elles alignées d’elles-mêmes pour que ce Mondial soit une si grande réussite ? On est tenté de le croire, quand on pense que les organisateurs ne semblent pas avoir tenu compte de l’absence du public du fait de la faiblesse de la population du pays. Il a fallu que les Marocains se déplacent en masse pour créer de l’animation, et éviter au Qatar un mondial atone. Le public marocain est connu pour être un des meilleurs au monde*. Il a su créer une ambiance particulièrement joyeuse et chaleureuse grâce à sa volubilité, son affabilité et son côté bon-enfant. On n’insistera jamais assez sur ce public providentiel qui a apporté toute la saveur qui a failli manquer au Mondial.


Pour revenir à la FIFA et son rapport immodéré à l’argent, et ce au détriment même du football, force est donnée de constater qu’elle n’est pas étrangère à l’inflation indécente qui frappe ce sport tant les sommes engagées donnent le vertige. On a vu par exemple le PSG déboursé au même instant la bagatelle de plus de 400 millions d’Euros pour s’attacher les services de deux joueurs : Neymar et Mpapé.


La boulimie des grands clubs est tolérée par les instances de la FIFA. Dans sa vaine tentative de mettre fin aux hold-up réguliers des cadors européens qui volent les pépites des petits clubs, la FIFA a accouché d’une règle inopérante, appelée « fair-play financier ». Une règle qui a failli emporter une équipe aussi prestigieuse que le FC Barcelone, mais qui peut être facilement contournée par les clubs appartenant désormais à des oligarques et des milliardaires en mal de hobby. Pour cela, ils suffit à ces richissimes propriétaires d’augmenter les fonds propres de leur club pour rétablir l’équilibre et donner l’apparence que la situation du fair-play est sauve.


Je lisais, il n’y a pas si longtemps sur les réseaux sociaux un commentateur désabusé disant ceci : depuis que les grands clubs de football appartiennent à des milliardaires, les joueurs apparaissent de plus en plus comme des mercenaires. Terrible constat qui ne semblent nullement interpeller les dignitaires FIFA.


Pourtant les signaux inquiétants émanent de partout. Le Brésil et l’Argentine par exemple, offrent le plus important gisement des meilleurs joueurs au monde. Pourtant leurs clubs n’arrivent plus à rivaliser financièrement avec les clubs européens. Ils se trouvent parfois dans l’obligation de se séparer de certaines de leurs pépites pour se refaire une santé financière.

Tout cela sous le regard complaisant de la FIFA ! À croire qu’elle n’est là que pour creuser les inégalités entre l’Europe et le reste du monde.


Dilemme pour la FIFA : soit l’argent avant le foot, soit le foot après l’argent. Bien sûr que ce n’est pas la quadrature du cercle, mais en fait c’est le cœur d’une doctrine qui nourrit une bulle qui enfle et enfle, et qui finira inéluctablement par éclater. Avant que l’irréparable ne se produise, il y a lieu d’envisager un démantèlement progressif de cette grosse machine.


L’attitude de défiance face à cette organisation devenue fantoche à bien des égards et toxique à tous les égards, est partagée par l’écrasante majorité des fans du football. Elle s’accompagne aussi d’un sentiment d’impuissance des petits, mais d’un appel insistant des puissants à des mesures coercitives.


À cet effet, signalons qu’il y a comme une trêve décidée par le FBI et le département de Justice américain pour surseoir aux poursuites diligentées avant 2015 contre la FIFA. Ceci par souci de ne pas perturber la Coupe du monde de 2026, prévue en Amérique du Nord.


Les poursuites reprendront immanquablement à l’issue de cette compétition. Qu’adviendra-t-il si la Justice américaine devrait sévir durement, ou si c’est la bulle financière qui finira par éclater ?


Parler de démantèlement peut paraître excessif. Malheureusement une simple réforme ne concernera que l’organisation FIFA elle-même, mais quid de la culture ambiante où le football-roi est outrageusement écrasé par l’argent-roi ? Il faut rappeler avec force que c’est tout le football qui est gangrené par l’argent. Pour ne donner qu’un exemple, on citera le cas d’une majorité de joueurs qui revêtent le maillot d’une équipe, non pour le plaisir de jouer au foot, mais pour l’argent que cela va leur rapporter. Ils finiront par se vendre au club le plus offrant, endossant ingénument le statut de mercenaires. Quel gâchis !


Posé en termes aussi douloureux, le démantèlement est à l’évidence très difficile à mettre en œuvre. Mais garder la FIFA en l’état est porteur de risques tout aussi graves.

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*Les groupes « Ultras » des équipes du Raja et du Widad figurent dans le Top Ten des groupes les plus impressionnants au monde.


Abdelahad Idrissi Kaitouni.















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